Page 31 - Le Portrait Espagnol au Musée du PradoLe Portrait Espagnol au Musée du Prado
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entre la personnalité, propre et distincte, et l’ idée de groupe s’ exprimait de façon très particulière parmi les portraits de chefs ou hauts responsables du monde militaire et politique, faisant cas autant des perdants que des vainqueurs quand l’ intention de l’œuvre le requérait, comme cela apparaît fréquemment dans le répertoire romantique qui s’étendit au-delà de plusieurs décennies en Espagne.La variété des portraits, de leurs dimen- sions et de leurs supports, fut une condition du développement de ce genre puisque ces derniers étaient directement liés à l’usage, à la diffusion et aussi à la réception qui allaientenêtrefaits.L’objet«portrait»fut déterminé par le caractère utilitaire que sup- pose sa fonction : il fut envoyé dans les cours étrangères pour servir aux négociations matrimoniales, diffusé dans les centres de pouvoir pour faire connaître les souverains et les princes, remis en guise de présent à des parents ou à des partisans, placés dans des lieux publics ou privés, dans des boîtes ou sur des bijoux, etc. Par conséquent, la taille pouvait aller du spectaculaire portrait militaire en gloire, de type équestre, à celui en pied, soit en extérieur, à l’air libre, soit dans un décor d’intérieur. Il pouvait aussi être à mi-corps, en buste ou de tête. En n, de taille réduite, voire miniature, il était in- séré dans des objets tels que des broches, des médaillons ou des bracelets. C’est ainsi que s’élaborèrent les magni ques portraits des monarques (voir, par exemple,  g. 9), princes, dignitaires – ecclésiastiques, militaires et ci- vils –, aristocrates, bourgeois, académiciens, hommesdelettres,acteurs,musiciensettout29autre représentant de la société espagnole, comme ce fut le cas au XVIIe siècle, les ar- tistes de cette dernière étape ayant in uencé ceux des décennies du siècle suivant.Il est nécessaire de rappeler que les pré- occupations personnelles et les différents mo- biles issus des volontés d’une certaine clien- tèle puissante imposèrent aussi leurs critères aux artistes. Ainsi, sous les règnes de Ferdi- nand VII et de sa  lle Isabelle II (1833-1868) et sous l’époque troublée de la Révolution de 1868, le passage éclair d’Amédée Ier (1871- 1873) issu de la maison de Savoie, puis les dix mois de la brève Première République – avec quatre présidents (1873-1874) –, ainsi que la Restaurationd’AlphonseXII(1875-1885) et la Régence de la reine mère, Marie-Chris- tine de Habsbourg Lorraine (1885-1902), au nom de son  ls Alphonse XIII (1886-1931), on vit émerger de nouvelles aspirations, à la marge du courant traditionnel, dans le monde de la petite noblesse, de la bourgeoi- sie naissante et des milieux intellectuels avec lesquels ils partageaient les mêmes préoccu- pations, sensibles aux modes étrangères qui leur étaient connues grâce aux voyages, aux correspondances et à l’étude de gravures ou à la découverte de peintures venues d’autres pays. Par conséquent, les œuvres d’un même artiste peuvent paraîtres très hétérogènes selon le sujet choisi, le commanditaire, la  n ultime de l’œuvre et le moment précis de l’exécution dans la carrière de l’artiste. Ceci est tout à fait visible à travers l’œuvre constante de Joaquín Espalter (1809-1880), du solide Carlos Luis de Ribera (1815-1891 ; voir, par exemple,  g. 10), de José Casado del Alisal (1832-1886), portraitiste doté


































































































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